SYLVIANE CHATELAIN
UNE MAIN SUR VOTRE ÉPAULE
Si on sortait
Chronique de Roger Guignard, sur Radio Suisse Romande «La Première»Entrer dans l’univers d’un livre, dans son atmosphère, c'est aussi une façon de sortir du quotidien et de s’évader... Aujourd'hui, Roger Guignard, vous nous proposez un coup de cœur, votre coup de cœur, pour le dernier livre de Sylviane Chatelain. Il s’intitule Une main sur votre épaule, est publié chez Bernard Campiche Editeur, et pour l’apprécier vraiment, le lecteur doit s’abandonner à son imagination...C’est ça ?
— Dans son style, ce livre est un pur diamant...c’est magnifiquement écrit, poli et ciselé comme un petit bijou... Le ton est grave et subtil tout à la fois, et sans le moindre lyrisme. Les phrases sont dépouillées, épurées et pourtant d’une très rare puissance d’évocation. C'est du tout grand Sylviane Chatelain, et voilà plus de dix ans que je salue le talent et l'exigence de cette Jurassienne bernoise, d'ailleurs récompensée par de très nombreuses distinctions littéraires... Le prix Schiller, le Prix de la Bibliothèque Pour Tous, et beaucoup d'autres...
Mais vous parliez de l'imagination du lecteur?
— Justement... le diamant a plusieurs facettes, et quand l’écrivain en choisit une, puis une autre, au gré de sa mémoire... il y a un moment où vous, lecteur, avez à reconstituer le tout! À créer le bijou ou à réunir les pièces du puzzle, si vous préférez cette image...Alors, chaque texte du livre... Le Pianiste, La Mort et La Gravure est précédé de quelques pages en italiques, comme une esquisse, comme des pistes possibles...Et après, au boulot, ami lecteur! La voisine du pianiste raconte le chemin qu’elle a fait pour le rencontrer dans sa maison... mais plus tard, c'est lui qui nous parle de sa Grande Maison, qu'il a choisi pour elle. On change de point de vue, et à nous d'imaginer une histoire d'amour, ou une fascination de l'un pour l'autre... Finalement, le lecteur réécrit l'histoire à sa façon...
Et cette main sur notre épaule?
— C'est peut-être la main de l’écrivain qui bâtit sa maison de mots, celle du pianiste sur les touches ou du peintre évoqué dans La Gravure, celle aussi – et peut-être surtout, de la Grande Faucheuse, La Mort, évoquée avec une force, une densité dans un texte très court qui, franchement, m'a laissé béat d’admiration. Je vous l’ai dit: du pur diamant, sur le fond et sur la forme!
ROGER GUIGNARD. Radio Suisse Romande «La Première»